Armand Bulwa
« En janvier 1945, au cœur d’un hiver très dur, les nazis prirent la décision d’évacuer le camp de Częstochowa. Nous avons dû embarquer dans des wagons à bestiaux. Dehors, on hurlait des ordres. Nous échangions des regards affolés, chargés d’incompréhension, tandis que nous parvenait le bruit des bombardements soviétiques, source d’angoisse autant que d’espoir.
Après quatre jours de ce voyage terrifiant, la moitié d’entre nous avait péri en route. Les portes se sont ouvertes sur un paysage de neige, une colline au cœur d’un bois de hêtres : Buchenwald. J’ai reçu le numéro 116.536. J’ai enfilé la chemise et le pantalon rayés. Mais je n’avais pas de ceinture pour le faire tenir… »
A.B.
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Aron Bulwa, fils d’un couple de tailleurs, a dix ans lorsque le quartier juif de Piotrków, où il est né, est transformé en ghetto et cerné de barbelés. Contraint au travail forcé, puis déporté à Buchenwald, il y survivra trois mois, à jamais redevable au geste d’un garçon de son âge, Lolek Buzyn, qui lui offre une ceinture…
Recueilli par l’Œuvre de secours aux enfants (OSE) en mai 1945, seul rescapé de sa famille, il découvre la France, dont il ignore tout. Il y gagne un prénom, Armand. Et une famille qui, comme lui, s’appelle Bulwa. Son témoignage est hanté par une énigme : pourquoi a-t-il survécu ?
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Bulwa Armand (Aron)

1929, Piotrekow (Pologne)
Armand Bulwa est né en Pologne près de Lodz. Il a 10 ans quand le quartier juif de sa ville natale est transformé en ghetto. Grâce à son père, Armand est embauché en 1941 dans une verrerie extérieure au ghetto et échappe à la semaine de rafles qui conduit sa mère et son jeune frère à Treblinka où ils seront exterminés. Il perd ensuite définitivement contact avec son père. Il est témoin des atrocités de Hiwis auxiliaires ukrainiens des Allemands et est prisonnier dans la synagogue de sa ville natale. Il échappe aux fusillades de Rakow en trouvant une place de travailleur forcé. Puis en novembre 1944 il est transféré dans une fonderie dépendant du camp de Czestochowa et survit grâce à la protection de son oncle. Armand est évacué vers Buchenwald en janvier 1945 (matricule 116536). Séparé de son oncle, il survit à nouveau grâce à un réseau d’entraide.
Après la libération de Buchenwald, seul rescapé de sa famille, tous les membres ayant été fusillés ou exterminés dans les camps, il est accueilli en France avec 426 autres enfants et adolescents de Buchenwald et transite par le foyer de l’OSE avant de construire son existence dans ce pays qu’il ne connaissait pas avant 1945. Témoin infatigable, il rencontre les élèves de écoles depuis les années 1980.