BIOGRAPHIE
Né le 12 janvier 1924 à Houilles dans les Yvelines. En octobre 1940, alors âgé de seize ans, il tente de passer en zone libre. Arrêté à la Haye-Descartes, interné à Tours, il réussit à s’évader lors d’un transfert. Il n’a plus de papier, recherché par les polices allemandes et françaises, il entre en clandestinité. Il parvient enfin à rejoindre la zone libre. En juillet 1941, il arrive à Brive et s’engage au 41ème RI dans l’Armée de l’armistice pour la durée de la guerre. Il se trouve au Lioran, (Puy-de-Dôme), lorsque les allemands envahissent la zone sud. Il est démobilisé et noue des contacts avec des réseaux de résistants dans le massif central. Le 29 août 1943, au sein d’un groupe composé de militaires et d’officiers, il tente de franchir la frontière espagnole pour rejoindre les Forces Françaises Libres. Ils sont arrêtés en Espagne par la police espagnole, ramenés en France à Bourg Madame et livrés aux Allemands. Il est emprisonné, interrogé, torturé à la citadelle de Perpignan. Il y rencontre François Arménio. Le 5 septembre 1943, il est condamné à mort. Mais il n’est pas exécuté. Le 19, tous deux sont transférés au camp de Royallieu à Compiègne . Il y reçoit le numéro 18245 et y reste 4 mois. Le 17 janvier 1944, il est déporté à Buchenwald qu’il atteint le 19 et reçoit le matricule 41279 et déclare qu’il est militaire. Il effectue sa période de quarantaine au Block 51 du Petit camp. Le 11 février 1944,il est transféré au Kommando de Dora où sont assemblées, dans un Tunnel, les fusées A4-V2. Il est affecté au transport à épaules d’hommes des coques et des queues V2, à des travaux de soudure au cours desquels il procède à des sabotages. Lors de cette tâche, il reçoit une limaille de fer dans l’œil, l’infection gagne, n’y tenant plus, contre l’avis de ces camarades, il se rend au Revier. Un homme en blouse blanche en voyant son triangle rouge avec un «F», le prend à part, le soigne en lui retirant ce bout de limaille et il remet un petit flacon de goutte, et lui conseille de déguerpir très vite. Cet homme vient de lui sauver la vie. Au retour, il apprendra que c’était un inspecteur vétérinaire affecté au Revier – Marcel Petit KLB 44448- et ils auront l’occasion de se revoir des années plus tard. Les détenus travaillent dans d’effroyables conditions car le creusement de l’usine souterraine n’est pas terminé. Ils vivent sans sortir de cet enfer où règnent le bruit des explosions et des marteaux-piqueurs qui percent les galeries, la poussière, l’hygiène absente, la vermine qui prolifère et sous les coups. Durant 3 mois, sans voir le jour, il survit à tout cela . En avril, il connaît les baraques construites à l’extérieur par les déportés eux-mêmes, ceci améliore sensiblement le sort des détenus mais les appels interminables empirent la situation des déportés. En avril 1945, le complexe de Mittelbau-Dora est évacué Il fait partie du dernier convoi composé des « spécialistes » de l’usine Mittelwerk à quitter le site le 5 avril. Ils partent dans des wagons découverts avec une boule de pain et une boîte de conserve. Le convoi roule doucement avec de fréquents arrêts. Parfois, les déportés poursuivent la route en colonne. Les provisions sont épuisées. Après trois jours, arrivés à Osterode, ils sont emmenés à pied pendant une quarantaine de kilomètres. À Oker, épuisés, ils sont contraints de reprendre le train aux environs de deux heures du matin, et arrivent à Ravensbrück le 14 avril. Jean Cormont reçoit alors un nouveau matricule le 15321. il est enfermé dans des baraques, reçoit un litre de soupe et un morceau de pain. dans la soirée, autre distribution, un colis de 3 kg de la Croix-rouge internationale. Le 29 avril 1945, il faut repartir entassés dans des camions sur les routes, cette fois en direction de l’ouest, vers le camp des femmes de Malchow. Le 1er mai 1945, les SS évacuent le camp c’est la débandade! Pour les déportés c’est la ruée vers les cuisines. Deux heures plus tard, le camp est libéré par les troupes Mongols. Les Russes demandent aux détenus de quitter le camp pour occuper les maisons avoisinantes. Le collectif français incapable de marcher (environ 300 déportés) se regroupe dans l’ancienne infirmerie SS. A une centaine de mètre du camp car il y a des lits et de quoi se soigner. Jean Cormont avec André Cardon (KLB 14204) et Roland Filiatre )KLB 43997) prennent la responsabilité de ce petit camp avec deux femmes détenues Lucie Brembêche et Mélanie Gaude pour soigner les plus grands malades. A partir du 8 mai, ils sont aidés par le Révérend Père Aubrun aumônier des prisonniers de guerre. Devant l’ampleur de la mortalité, suite au manque de médicaments et aux conditions précaires, Jean décide de partir chercher de l’aide en zone américaine à Schwerin. Il arrive à convaincre le capitaine Guth de passer en zone russe pour rapatrier les détenus occidentaux en zone américaine et permettre leur évacuation en France. Plusieurs ambulances passent, enfin, en zone russe pour venir chercher les plus grands malades. Dès lors, les rapatriements vers la France s’organisent en avion, en train, en camion pour les plus vaillants. Ceux qui ne sont pas transportables sont hospitalisés dans les hôpitaux allemands. Jean lui reste à Malchow, il va leur rendre visite et leur remonte le moral. Ce n’est pas facile d’accepter d’être soigné par des allemands après avoir subi tant de souffrance durant ces longs mois Le 25 avril, il est rapatrié sur Schwerin, puis par avion, il regagne la France le 29 mai.
Après de longs mois de soin, il reprend sa carrière militaire, part en Indochine en 1946, quitte l’armée en 1952 et devient salarié du «Joint français» jusqu’à sa retraite en 1978. Dès son retour à la vie civile, il milite beaucoup au sein de la Fédération Nationale des Déportés Internés Résistants et au sein de l’Association Française Buchenwald Dora et Kommandos auprès de Marcel Paul.
De 1985 à 1999, il est secrétaire général de l’Association Française Buchenwald Dora et Kommandos et s’investit aux côtés de Jean Lloubes où «sa patience et sa détermination n’ont d’égales que sa sollicitude auprès des plus âgés comme des plus jeunes». Membre actif de l’Association, il accompagne les voyages de mémoires, témoigne dans les établissements scolaires, dans les usines, œuvrant pour le rapprochement des associations. Il participe de par ses témoignages recueillis par Yves Le Maher au projet de la Coupole afin de faire connaître aux autres générations ce qu’ ont vécu tous ces hommes dans le tunnel de Dora. Le 9 mai 1997, il est présent lors de l’inauguration du centre national d’histoire de la Coupole.
Marié à Paulette Cormont, il a deux enfants: Michel et Marie-Joëlle, trois petits enfants Christophe,Thierry et Fabien, une arrière petite- fille Natacha en 2000 et un arrière petit- fils Maël né en 2016 qu’il n’a pas connu.
Il est Chevalier de la Légion d’honneur, titulaire de la Croix de guerre 39-45, Croix de Guerre des Théâtres des Opérations Extérieures, Médaille de la Résistance, Médaille des déportés pour faits de Résistance, Médaille des Internés pour faits de Résistance, Médaille des Combattants Volontaires de la Résistance, Médaille des Évadés, Médaille de la Reconnaissance Française et Médaille Service Volontaire dans la France Libre.
Jean CORMONT est décédé le 1er août 2005 à Meulan-en-Yvelines.
Marie-Joëlle GUILBERT née CORMONT
Paru dans Le Serment N°303