Jean Maurice, dernier résistant Sénonais déporté à Buchenwald et Dora
Publié le 20/09/2015 à 16h06
Entré dans la Résistance en 1942, puis arrêté par les Allemands, le Rosaltien a été déporté seize mois dans les camps de concentration de Buchenwald et Dora.
De cette période, il a gardé la malice dans le regard. Son humour aussi. « Même dans les pires moments, j’ai toujours eu bon moral. Et je parvenais même à faire rire les autres. » Jean Maurice, 91 ans, a vécu les derniers jours de la Seconde Guerre mondiale, en Allemagne, dans les camps de concentration : Buchenwald, en janvier 1944, où plus de 56.000 prisonniers moururent?; Dora, en septembre de la même année, pour travailler dans l’usine souterraine où se fabriquaient les V2. Le Rosaltien a également survécu à la terrible « marche de la mort » qui suivit l’évacuation du camp par les SS, en avril 1945, à l’approche des troupes alliées. Sa tenue de déporté portait le matricule 43.932.
Entré en Résistance en 1941, pour avoir su dire « non » à l’occupant allemand, alors qu’il travaillait dans une carrière dans la Sarthe, Jean Maurice est devenu, au gré des circonstances, l’un de ces combattants de l’ombre qui ont côtoyé « l’horreur absolue ».
Longtemps après sa libération par les troupes russes, en avril 1945, du côté de Parchim (au nord-est de l’Allemagne), l’ancien déporté a tu le souvenir de ses seize mois de captivité. « On ne nous croyait pas. On nous prenait pour des fous à l’époque. Je n’en parlais pas. Ni même à mes trois filles. Plus tard, mes petits-enfants ont voulu savoir. » Sans doute les mots ne rendent-ils qu’une partie de la réalité. Du temps écoulé. « Car dans les camps les plus durs, on se demandait chaque soir si on aurait la force de revivre le lendemain. »
Mais parce qu’il convient de témoigner encore et encore sur « l’inconcevable », Jean Maurice a fini par briser le silence respectueux de « ce vécu qui ne vous quitte jamais vraiment ». À travers des conférences, en rencontrant des collégiens où lors de grandes cérémonies commémoratives. « Avec le temps, évoquer cette période revient pour moi à regarder un film dont je connais les moindres détails du scénario. C’est une sensation bizarre. Je suis devenu le spectateur de mon propre vécu. »
Le souvenir est vif, la chronologie des faits plus aléatoire. Les cinquante-quatre jours d’incarcération et d’interrogatoires par la Gestapo, à la prison d’Angers, en 1943 : « Les coups de nerf de bœuf étaient plus insupportables que la matraque, car ils arrachaient la peau. » Ou encore l’épouvantable voyage jusqu’à Buchenwald, entassés par centaine dans des wagons à bestiaux, sans boire, ni manger : « Les SS nous faisaient porter les corps des gars morts au cours du trajet dans le dernier wagon. Dans ces situations-là, on ne pense plus, on attend la mort. »